*** The article for SOLA Food Co-op is available here in english ***
Après un premier article consacré au Zéro Déchet avec NO Waste Nola, ce nouveau « À la rencontre de » vous emmène à Los Angeles voir SoLA Food Co-op, une alternative aux supermarchés.
S’alimenter est un point essentiel de notre consommation. Malheureusement, dans notre société occidentale, ce besoin primaire est devenu plus facile et plus ardu en même temps. Le supermarché est désormais un lieu central et parfois unique pour accéder à ces ressources. Mais la qualité des produits qui y sont vendus, autant que les pratiques sociales et les ressources humaines qui y sont appliquées, sont souvent décriés.
Mais vous nous direz : comment y échapper ? Une alternative s’est hissée aux États-Unis : les supermarchés collaboratifs ! Vous ne savez pas ce que c’est ? C’était aussi notre cas avant de rencontrer Monique. La bénévole pour SoLA Food Co-op à Los Angeles a répondu à toutes nos questions.
Un supermarché collaboratif : Quézako ?
Derrière ce nom se cache un principe bien simple : ramener le pouvoir de décision des citoyens sur les étals de l’épicerie. Le système fonctionne comme une coopérative. Et comme toute coop, il lui faut des membres pour se développer. Chez SoLA Food Co-op « vous payez 200 $ US pour devenir membre-propriétaire à vie. Cette adhésion vaut aussi pour tout votre foyer. » Mais dans les faits qu’est ce que cela implique ?
- Premièrement, pouvoir choisir les produits en vente dans l’épicerie
- Deuxièmement, les membres-propriétaires élisent le conseil de direction, mais aussi ont le pouvoir de dire quand les choses ne leur conviennent pas sur la manière dont est géré le supermarché.
- Troisièmement, ils bénéficient de réductions exclusives, et du partage des profits à la fin de l’année.
- Quatrièmement, certaines coopératives impliquent une participation bénévole des membres de l’ordre de 4 h par mois environ.
Mais ce n’est pas tout. Monique nous l’a répété, en prenant part à ce projet « vous offrez aussi au reste de la communauté de pouvoir accéder à une nourriture plus saine ». Car les supermarchés collaboratifs sont ouverts à tous. Donc même ceux pour qui il serait difficile de payer les 200 $ d’inscription pourraient bénéficier de son implantation dans le quartier. Et c’est une bonne chose selon la bénévole de SoLA Food Co-op.
Comment est née SOLA Food Co-op ?
« L’idée de créer un supermarché collaboratif dans ce quartier a éclos en 2011 ». Monique nous raconte que la fondatrice, Bahni Turpin, était arrivée peu avant dans le quartier. Après avoir rapidement fait le constat que celui-ci disposait de peu d’offres intéressantes en nourriture, on lui a suggéré l’idée de mettre en place un supermarché. Et c’est là qu’elle a découvert le modèle des coopératives ! « Elle a compris qu’elle pouvait inspirer les membres de la communauté à monter un supermarché. Et le plus important dont ils seraient copropriétaires ensemble ! »
Pourquoi dans South L. A. ?
« En fait, notre quartier est souvent appelé un désert alimentaire. Où il n’y a pas assez de nourriture pour tous les habitants ». Le peu d’offres dans South LA sont des mini épiceries qui ne vendent que des denrées de basse qualité et peu nutritives, comme des 7elevens. Donc l’accès à une nourriture saine est un vrai problème ici. « SoLA Food Co-op se bat pour amener de la nourriture saine dans notre communauté, pour ceux qui ne peuvent pas en sortir ».
Dans ce quartier, connu pour être un des plus pauvres de Los Angeles, de nombreuses personnes n’ont pas la mobilité suffisante pour se déplacer vers de meilleurs supermarchés. Les transports en commun sont compliqués dans cette zone et peu d’entre eux ont les moyens d’avoir une voiture.
« Notre but n’est pas de faire d’énormes profits. Nous voulons vraiment que les membres de notre communauté bénéficient de nourriture saine. »
Une communauté en mauvaise santé
Nourriture saine. Ces deux mots ont été récurrents dans notre entretien avec SoLA Food Co-op. On pourrait penser que c’est dû à une tendance actuelle de manger mieux. Mais non, cela vient surtout d’un constat dramatique. Nombre d’habitants de ce quartier souffrent de maladies coronariennes ou de diabète¹. Des pathologies souvent dues à une mauvaise alimentation. Mais Bahni et son équipe comptent bien changer tout ça en apportant à la communauté un meilleur accès aux produits frais et de qualité. « Notre projet est d’avoir une section fruits et légumes frais. Conjugué à des aliments secs en vracs (noix, riz, légumineuses, etc.), mais aussi des céréales du fromage… Bref, une épicerie avec tous les services alimentaires. »
Monique va plus loin dans ses explications en nous disant qu’ils ont créé des partenariats. Ils se concentrent sur des producteurs et des artisans locaux pour fournir directement la boutique ! « L’idée est de garder notre argent dans la communauté ». Et cela se fera en permettant aux personnes d’acheter dans leur quartier et aux producteurs/artisans de pouvoir y vendre leurs biens. Les belles bases de l’économie circulaire.
Comment se porte le projet ?
Adhérents et bénévoles : le socle de toute coopérative
SoLA Food Co-op réunit près de 200 membres-propriétaires actuellement. C’est bien, mais Monique nous confie qu’ils ont besoin de plus que ça pour ouvrir l’espace qu’ils ont prévu. « Notre but est de rassembler 1000 membres de la communauté pour nous permettre de lancer le supermarché ». Mais cela peut aussi être moins, s’ils commencent avec un plus petit magasin en attendant d’avoir les fonds suffisants pour s’agrandir.
Aux États-Unis, les supermarchés collaboratifs mettent entre 2 et 5 ans pour ouvrir. C’est un travail de longue haleine dû au besoin d’avoir le support de la communauté locale. Notamment d’un nombre de membres-propriétaires suffisants, pour avoir le soutien de banques et enfin ouvrir leurs portes. Heureusement, Bahni peut compter une trentaine de bénévoles motivés ! Dont environs 10 qui sont engagés de manière plus régulière et permettent de créer des événements. Leur but commun est de faire connaître SoLA Food Co-op à la communauté.
Quelles missions se sont-ils données ?
Leurs événements servent à expliquer aux habitants du quartier l’intérêt de faire partie d’un supermarché collaboratif. « Ceux-ci se rangent dans deux thématiques : la mise en lumière des artisans locaux et l’éducation à l’alimentation. » Pour les premiers, ils font venir leurs partenaires (fabricants de granolas maison, un traiteur végane, etc.) pour les présenter à la communauté. Les seconds visent à sensibiliser les habitants à l’impact de l’alimentation sur leur santé. Tous ces ateliers permettent de créer un esprit de cohésion entre le projet et la collectivité ! Celle-ci est donc plus à même à participer et à vouloir le faire grandir.
Les embûches
« C’est difficile pour les gens de visualiser quelque chose qui n’est pas physique. Ils nous demandent “Où est le magasin ?” et notre réponse est “Il ouvrira ! Aussitôt que vous en ferez partie”. »
C’est le plus gros problème auquel les projets collaboratifs sont confrontés. La majeure partie de leur travail se fait avant l’ouverture du supermarché. En effet, ils ont besoin de membres pour ouvrir leur porte. Malheureusement, comme Monique nous l’a confie, c’est difficile, car « les habitants sont inquiets et parfois pensent que c’est un risque ». Il faut donc savoir trouver les mots justes. D’autant plus que dans cette communauté, ils ont peu l’habitude de posséder (ni une maison ni une voiture), ainsi un magasin leur apparaît comme une montagne infranchissable. C’est pour cela que les bénévoles ont à cœur de rencontrer les habitants, à travers leurs événements, pour les rassurer !
Les Supermarchés collaboratifs vous intéressent ?
Vous trouverez beaucoup d’autres informations dans le documentaire Food Coop, de Tom Boothe, sorti en novembre 2016 ! Le réalisateur a retracé l’histoire du premier supermarché collaboratif des États-Unis, le Park Slope Food Coop à Brooklyn en 1973 (il y a 44 ans donc !). Mais la France n’est pas en reste. En effet, des projets du même type ont émergé ces dernières années. Que ce soit Lyon, Toulouse ou encore Annecy, ces supermarchés avant-gardistes éclosent. Et certains sont déjà en activité, notamment à Grenoble ou Paris. Vous retrouverez toutes les informations sur cette carte (et d’autres sont seulement des bourgeons).
L’idée vous tente, mais il n’y en a pas dans votre ville ? Pourquoi ne pas monter votre projet ? C’est possible. 🙂
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¹ Maladies coronariennes : 178 pour 100 000 dans South LA contre 131 pour 100 000 dans South Bay/Diabète : 11 % des adultes de South LA ont déjà été diagnostiqué pour du diabète. Source : City of Los Angeles—Health Atlas 2013. Figure 16, pg 57 et figure 18, pg 59.
© Photos de SoLA Food Co-op — tous droits réservés
Wow, c’est super intéressant tout ça! une belle découverte, une superbe initiative qu’on aimerait bien voir naître un peu partout! Bonne continuation à SOLA Food Coop!
J’ai d’ailleurs été agréablement surprise de voir qu’il y avait autant de projets de supermarché coopératifs en France ! C’est vraiment génial 🙂
Ça me rassure tout de suite! Surtout vu la frustration que je dois gérer au quotidien sur une île où tout est amené en paquets, en sachets, en plastique, en usage unique…
Aïe aïe aïe pour le moral donc merci de le remonter un peu en me montrant les initiatives des autres qui pourraient servir d’exemple ici si davantage de personnes se sentaient concernées…